Les Évangiles hébreux des Sépharades[1] sont les versions les plus intéressantes et les plus étonnantes des Évangiles que nous connaissions. Elles sont truffées d’informations sur le sens original des enseignements de Yéshoua[2] et sur sa vie. C’est aujourd’hui un fait bien établi que l’Évangile de Matthieu a été écrit à l’origine en hébreu : Non seulement, c’est ce que nous apprennent les pères de l’Église,[3] mais la découverte des manuscrits de la mer Morte a démontré que l’hébreu était encore la langue du peuple juif au premier siècle. Les études linguistiques des textes hébreux de Matthieu[4] réalisées ces dernières années ont également fourni de nombreuses preuves de l’origine hébraïque de l’Évangile de Matthieu.
Par conséquent, si nous voulons connaître le sens originel de l’Évangile de Matthieu, ce que Yéshoua voulait vraiment dire lorsqu’il enseignait, et quelles sont les réponses aux prétendues contradictions, nous ne devons pas nous tourner vers les manuscrits grecs, les lexiques grecs ou le sens « originel » des mots grecs, etc. Si nous voulons vraiment comprendre ce que Yéshoua a fait et enseigné, nous devons étudier les manuscrits hébreux, le sens des mots en hébreu, les figures de style en hébreu et la culture hébraïque du premier siècle. Le but de cette traduction est de faciliter ce type d’étude pour ceux qui ne lisent pas l’hébreu.
Jusqu’à présent, le texte hébreu de Matthieu le plus connu était la version de Shem Tov. Cette version comporte de nombreux hébraïsmes, des jeux de mots et d’expressions, ainsi que des mots-clés hébreux qui relient les différentes sections entre elles.[5] Elle résout plusieurs contradictions présentes dans le texte grec de Matthieu. La Shem Tova a fait l’objet de nombreuses études au cours des dernières décennies.
Le problème de la version Shem Tov réside dans le fait que cette version a été copiée par des personnes qui renient Yéshoua, qui le rejettent en tant que Messie, et qui ont supprimé tous les passages dans lesquels l’auteur original lui-même identifiait spécifiquement Yéshoua en tant que « Messie ». Dans la version grecque de Matthieu, l’auteur lui-même identifie Yéshoua comme étant le Messie dans quatre[6] passages différents : En Matthieu 1.1 ; 1.17 ; 1.18 et 11.2, alors que dans la Shem Tov, Matthieu ne fait jamais référence à Yéshoua en tant que Messie du point de vue de l’auteur lui-même.
Le fait que Yéshoua ait été « appelé » le Messie (par d’autres) et que Pierre, par exemple, l’ait reconnu comme tel a été conservé dans le texte. Mais étant donné que chaque occurrence où l’auteur, Matthieu lui-même, appelle Yéshoua le Messie a été supprimée, la version Shem Tov de Matthieu est un livre anti-messianique (ou au mieux, neutre). Elle donne l’impression que même l’auteur de l’Évangile de Matthieu ne reconnaissait pas Yéshoua comme étant le Messie. Par conséquent, peut-on faire confiance à la version Shem Tov ?
Cette version contient également des contradictions insolubles, par exemple, d’après la Shem Tov, le jour avant la crucifixion de Yéshoua était « le premier jour de la fête des pains sans levain », et le jour après la crucifixion était « le matin après le jour de la Pâque ». La chronologie du texte de la Shem Tov de Matthieu est donc erronée et fait qu’il est impossible de montrer que Yéshoua est resté dans la tombe pendant trois jours et trois nuits.
En revanche, le manuscrit Vat. Ebr. 100[7] employé pour cette traduction appartient à une tout autre catégorie. Non seulement, il assimile clairement Yéshoua au Messie, mais il déclare ouvertement qu’il est le Fils d’El.[8] Ce manuscrit résout également de nombreuses questions et prétendues contradictions. Le manuscrit semble être une traduction du catalan vers l’hébreu, mais il est rempli de preuves linguistiques montrant qu’il ne peut en aucun cas être un dérivé du grec ni de la version latine de Jérôme, comme certains le prétendent.
La version catalane dont elle est probablement dérivée ne peut donc que provenir d’un manuscrit hébreu authentique.[9] Les Évangiles grecs (traduits plus tard en latin ) peuvent très bien provenir de traductions de manuscrits hébreux similaires à celui du Vat. Ebr. 100, mais il est impossible que le Vat. Ebr. 100 provienne du grec ou du latin. Des preuves linguistiques, ainsi que de nombreuses autres découvertes intéressantes seront publiées dans une série d’articles.
[1] Nom hébreu de l’Espagne
[2] Nom hébreu de Jésus.
[3] Papias, Irénée, Origène, Eusèbe et Jérôme déclarent tous que l’Évangile de Matthieu a initialement été écrit en hébreu. Pour les références, voir par exemple l’AENT (Aramaic English New Testament) 5ème édition 2012: Netzari Press, pp. 12, 13 ; etthe Hebrew Gospel of Matthew de George Howard, 1995: Mercer University Press, pp. 155, 156.
[4] Parmi les textes hébreux de Matthieu, on retrouve les versions de Shem Tov, Du Tillet et de Munster.
[5] Voir par exemple The Hebrew Gospel of Matthew de George Howard, 1995 : Mercer University Press, pp. 184 – 190.
[6] Dans le manuscrit Vat. Ebr. 100, Yéshoua est appelé le Messie par l’auteur à maintes reprises (cf. Matthieu 3.16 ; 4.1 ; 4.23 ; 5.1 ; 5.13 ; 5.17, etc.).
[7] http://digi.vatlib.it/view/MSS_Vat.ebr.100/
[8] Le mot El est le diminutif du mot Elohim/Dieu.
[9] Pour une analyse plus en profondeur de quelques preuves, voir les introductions des Évangiles de Marc et de Jean, disponibles à l’adresse suivante : www.hebrewgospels.com